Léa Tardieu (INRAE-TETIS)
Les minorités ethniques sont souvent confrontées à des inégalités environnementales, car elles sont plus susceptibles d’être exposées à des installations dangereuses et polluantes. Alors que les recherches sur l’impact des politiques d’urbanisme sur ces inégalités se multiplient, on en sait moins sur ces impacts en Europe. On en sait encore moins sur les nuisances disproportionnées auxquelles est confrontée la communauté des gens du voyage. L’implantation des sites des gens du voyage illustre comment des décisions d’urbanisme répétées dans le temps peuvent conduire à une discrimination systémique, puisque les représentants locaux déterminent où les gens du voyage sont autorisés à séjourner, influençant directement leur exposition aux nuisances environnementales. Nous avons construit une base de données originale qui relie l’implantation des sites des gens du voyage en France à des données sur les caractéristiques socio-économiques et environnementales. Nous avons développé une analyse statistique démontrant que les aires d’accueil des gens du voyage sont plus susceptibles d’être implantées dans des villes présentant davantage de nuisances et que ces aires sont plus exposées que d’autres zones résidentielles au sein de ces villes. Sur la base de nos résultats, nous discutons de deux mécanismes potentiels qui peuvent sous-tendre cette discrimination : la minimisation des coûts monétaires et les préférences discriminatoires des représentants locaux et des résidents.