A l’image du monde vivant, les sociétés humaines, le monde économique et la vie des entreprises sont pensés comme si une loi de l’évolution était à l’œuvre. La théorie de l’émergence, que partagent les différentes approches bio-inspirées, explique l’Economie Sociale et Solidaire (ESS) étant donné qu’elle descend d’une coévolution combinant une pluralité de principes économiques : marché, redistribution et réciprocité. L’ESS défend un monde meilleur en conciliant l’héritage de la révolution néolithique avec celui des chasseurs-cueilleurs où la « main invisible » de la Nature (ou de son auteur) œuvrait durablement à la survie de l’espèce, par la symbiose incluant toute forme de coévolution (mutualisme, commensalisme, antagonisme) et préservant la biodiversité. Selon ce modèle coévolutionniste, l’ESS ne résulterait pas d’une somme de décisions, de comportements ou d’actions individuelles, artificiellement sélectionnés et contrôlés, en vue de réaliser un ensemble de possibles souhaitables et prévus à l’avance. Elle émergerait plutôt d’une dynamique naturelle des interactions, éprouvée entre les communautés humaines et s’auto-organisant depuis les origines, avec une infinité de possibles non prévisibles (états de la nature, générations, propriétés, etc.). En corollaire, nos sciences de la décision doivent être repensées, notamment en matière de libre-arbitre, face aux grandes transitions contemporaines qui imposent de concilier à la fois les intentions humaines (i.e. l’artificiel) et les lois naturelles [l’arbre de vie au milieu du jardin et l’arbre de la connaissance de ce qui est bon ou mauvais (Genèse 2)]. C’est un changement de paradigme scientifique pour la bio-inspiration de nos modèles économiques. Toute artificialité est limitée comme toute rationalité. Seules les conditions initiales de l’émergence se raisonnent. C’est l’objet de cette recherche structurée en trois parties, les ancrages théoriques, l’étude de cas (C’est Qui Le Patron ?), la discussion.

Publiée le 18 février 2025